seitai tour {suite}

Le caractère du voyage

Après avoir évoqué le tourisme moderne qui s’est développé aux États-Unis et ensuite propagé dans le monde entier, Itsuo Tsuda insiste pour les voyages qu’il organisa entre 1977 et 1982 sur l’importance de la sensibilité :
«  Ce qui importe avant tout c’est la sensibilité des touristes vis-à-vis de l’expérience au contact d’un monde nouveau. Si la sensibilité est mal préparée, on ne voit rien d’autre que le reflet du passé dont on est chargé. »
Nous poursuivons donc ici la publication du bulletin dans lequel Itsuo Tsuda présenta le caractère des « Seitai Tours », seitai tour139publication illustrée par des photos prises par Bruno Vienne.

BULLETIN N°2 [2e partie]
par Itsuo Tsuda

Voici des caricatures typiques de touristes mal préparés :
L’Américain, texan, pose des questions au guide, chaque fois qu’on descend de l’autocar pour un repos de dix minutes :
– How high is that goddem mountain over there ? (Quelle est la hauteur de cette sacrée montagne là-bas ?)
Si le guide hésite à répondre, il le harasse du même genre de questions. Le guide, après quelques échecs, trouve une astuce : il invente des chiffres à l’improviste. Pourvu qu’il les prononce rythmiquement, à l’américaine, peu importe le reste.
– O.K. Let’s go !
Le Français, casanier, grogne et râle dans le lobby.
La soupe qu’on nous a servie hier soir, c’était dégueulasse. Tu te rends compte ? Il n’y a même pas de croissant au petit-déjeuner, ici.
Dépaysé, il bavarde, sans même regarder le paysage, peut-être parle-t-il de ses oncles qui sont de hautes personnalités ?
À la descente de l’autocar, il s’écrie :
– Tiens ! Regarde, Jeanne, c’est tout à fait comme chez nous, cette rivière, ces collines. Sans les maisons qui sont là.
– Oui mais, eux, ils ne parlent pas français, de toute façon.
– C’est y que c’est vrai.
À quoi bon voyager si on n’a que la nostalgie de la France qu’on transporte partout.
Le Seitai Tour  est basé sur une conception toute différente :seitai tour135
– Il réduit au minimum les éléments touristiques ordinaires (des visites de monuments dont on assimile mal l’arrière-plan historique, on en a tout de suite ras-le-bol).
– On est hébergé dans les auberges japonaises. Le bain chaud, le repas japonais, l’accueil du personnel japonais (exception faite en Chine et en Corée où il est difficile d’appliquer cette formule).
– On pratique le Mouvement avec les gens du pays (sauf en Chine). C’est un tourisme plutôt tactile que visuel, c’est unique dans son genre. On éprouve quelques fois une étonnante fusion de sensibilité, malgré la barrière du langage.
– Si la durée totale est courte (trois pays en moins de trois semaines), ce n’est pas un désavantage. Le contraste nous frappe avec plus d’impact. Quand on reste longtemps, pendant des mois, à un même endroit, ce sont les détails de routine qui prennent le dessus (contacts avec le même genre de personne : compatriotes, amis, patron de restaurant, etc., lieux de rencontre habituels).
– La durée de chaque étape est calculée pour qu’on ait le temps de s’imprégner de l’ambiance locale,  pas trop courte, mais pas trop longue.
C’est un voyage taste-vin.

aikikai_tokyo
Devant l’Aïkikaï (Tokyo 1980)